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Oeuvres érotiques complètes

Guillaume Apollinaire

La Musardine

  • Conseillé par
    22 décembre 2013

    Débauches & folies *!

    L'âge venant, j'ai décidé de me dévergonder... d'accord c'est la première fois, mais ici je parle d'un monstre sacré de la littérature française, Guillaume Apollinaire, que je n'avais jamais lu avant! Mais ce n'est pas la première fois que je commente un livre érotique! Donc ce n'est pas non plus la première fois que j'en lis!
    Offrons nous un peu de bon temps avant qu'il ne soit trop tard!
    Ce livre commence par une très longue préface appelée « L'impudique enchanteur » d'Alexandre Dupouy. Ce dernier a également participé à l'édition de ce volume.
    Mais je pense qu'il est nécessaire de signaler que cet ouvrage doit être réservé à un public très averti, certains passages étant particulièrement osés, pour ne pas dire choquants.

    Ces textes, publiés d'une manière clandestine en mille neuf-cent-trente-quatre, soit seize ans après la mort de l'auteur n'avaient jamais été réédités dans leur version intégrale.
    Deux récits, sorte de Docteur Jekill et Mister Hyde de la littérature érotique.
    Ce volume comprend "Les onze milles verges", "Les exploits d'un jeune Don Juan", ainsi que quelques poèmes.
    "Les onze milles verges ou les amours d'un hospodar", nous suivons donc les aventures tourmentées du Prince Monty Vibescu, hospodar héréditaire de Roumanie! Un hospodar (!) est d'après l'auteur une sorte de sous-préfet (au champ), titre que que l'on hérite de père en fils! Donc ce prince VitBaiseCuls est un joyeux noceur, il est en langage moderne à voile et à vapeur, aimant autant le côté pile que le côté face, ne rechignant ni sur les hommes ni sur les femmes!
    Nous le suivons durant sa vie de débauche de Bucharest (orthographe d'époque) à Paris, où il trouve un homme de main et plus, car affinités Cornaboeux, fidèle compagnon des futures débauches. Retour à Bucharest (entre l'aller et le retour, l'orthographe n'avait pas encore changé!), puis départ pour combattre pendant le siège (c'est le mot qui convient quand on encercle un ennemi) de Port Arthur durant la guerre entre les Russes et les Japonais.
    Le sexe et la mort sont ses compagnons de voyages. Certaines parties pas toujours fines se transformant hélas en tueries dans un immeuble parisien, dans un train et encore plus en temps de guerre. Un certain humour ne masque pas le côté complaisance dans le sadisme de certaines scènes. Dommage!
    Dans "Les exploits d'un jeune Don Juan", changement de lieu et surtout de contexte. Ici règne une certaine joie de vivre, le sexe est une expérience même si parfois la morale n'est pas toujours respectée! Roger est comme un coq en pâte, entre sa mère, sa tante, ses sœurs et la gouvernante, malgré son jeune âge. Il est le seul personnage masculin de l'histoire. Il a d'ailleurs cette phrase :
    - J'avais décidé que toute personne féminine de mon entourage devait faire partie de mon harem et je me renforçais dans mon opinion.
    Nous sommes dans une demeure cossue, à la campagne et en été! Saison propice pour les amourettes puis pour les amours. Et puis à la campagne ils se trouvent des servantes et valets de ferme qui se taquinent joyeusement et qui aussi vont plus loin que les simples moqueries. Les travaux des champs et le soleil aiguisent tous les sens! Une grande bouffée d'air pur venant à point nommé. Plusieurs poèmes illustrés terminent cet ouvrage.
    Des hommes et des femmes, victimes ou bourreaux, victimes consentantes, mais hélas pas toujours. Un prince qui la sort (désolé je n'ai pas pu m'en empêcher) et qui n'est pas très sortable, bref peu de personnages recommandables! Du moins dans la première partie du livre.
    Ensuite une famille pas moyenne du tout, et un garçon hyper doué dans sa matière de prédilection : le sexe! Alors il faut que tout le monde en profite, les travaux pratiques en tous lieux en toutes libertés.
    Les scènes de sexe, même si elles sont très osées et crûment décrites, ne me gênent pas.
    Par contre je trouve que l'auteur se complaît dans un sadisme très poussé à la fin de chaque orgie. Et comme par hasard les victimes sont toujours les femmes et pratiquement toujours ce sont elles qui sont tuées! Les morts violentes sont très nombreuses en particulier dans "Les onze milles verges", ce qui gâche notre "plaisir" de lecture, bien entendu !
    Un ouvrage qui me laisse dubitatif... Doit-on s'extasier sur le côté avant-gardiste de l’œuvre, le rejet des barrières littéraires de la censure ou alors se dire que tout grand auteur que l'on soit, il est malgré tout possible de s’appliquer une forme d’autocensure ?
    Autre question : quel était le but d'Apollinaire en écrivant ces textes, se faire plaisir, vagabonder sans aucune contrainte, pensait-il qu'un jour cela serait publié ?
    Le dessin de la couverture est de Picasso et les illustrations intérieures en noir et blanc sont de Berthommé Saint-André (dit Louis Berthommé).
    * des corps!