Le charme du Je-ne-sais-quoi
" Ne manquez pas votre unique matinée de printemps ! " Fils d'immigrés juifs venus de Russie, le philosophe-musicien est né sous le double signe de l'irrémédiable et de la distance ironique. Cynthia Fleury nous accompagne ici dans la lecture du maître des nuances et des paradoxes, avec toute la joie et la mélancolie qu'on peut trouver dans chaque instant à saisir. C'est une invitation à faire l'expérience de notre finitude, et à la savourer à l'infini, pour la mettre à l'épreuve de notre courage et de notre liberté. Un exercice de responsabilité et de pur amour. Parce que philosopher, c'est apprendre à vivre ! Anne-Marie
Une maison nous attend quelque part
Joyau perdu et retrouvé, ce court texte attendait son éditeur depuis des décennies… tout comme l’étrange bâtisse qui est le cœur du récit. Qui n’a pas, un jour, entraperçu depuis la fenêtre d’un train un détail singulier du paysage ? Le narrateur de « La maison », lui, franchit le pas : il s’engage au fond des halliers touffus… Tout est fascinant et profondément ambigu dans ce récit. Julien Gracq joue avec les codes : le seuil qui ouvre sur l’ailleurs, la forêt sombre des légendes arthuriennes et des contes, la maison fantastique - mais pour les transformer et nous entrainer dans une expérience troublante.
Comme dans « Un balcon en forêt » ou « Le rivage des Syrtes », le géographe Julien Gracq expérimente la rencontre d’un personnage avec un lieu. Ces trente pages sont un concentré de sa prose, de ses obsessions. La langue somptueuse, d’une précision redoutable, attrape le lecteur et ne le lâche plus. Mystérieux désir…
Frédéric
Chronique d'une défaite annoncée
Difficile d'aborder ce roman fascinant sans dévoiler son mystère : avant tout, l'énigme de cette voix qui raconte, et dont l'identité se dévoile peu à peu -jusqu'à un certain point.
On peut dire qu'il s'agit d'anticipation, peut-être dans quelques générations. Dystopie, et pourtant c'est notre monde, sans aucun doute. Vincent Message nous épargne tout l'attirail technico-scientifique à quoi se résume parfois ce genre de récit. Il ne bâtit pas laborieusement un univers : il nous propose simplement le nôtre, dans toute son ampleur. Et ce sont nos interrogations d'aujourd'hui et nos crises que le narrateur affronte : l'exploitation et l'effondrement du vivant, l'extractivisme, le pouvoir détenu par une minorité nantie et aveugle. Écologie, combats politiques et enjeux moraux sous-tendent une intrigue prenante dès la première page.
Le souffle de l'épopée et le murmure de l'intime se mêlent ici, la réflexion et l'imagination, le lyrisme et la rigueur d'une langue affûtée. Pour construire, en fin de compte, un parcours d'émancipation, difficile mais beau.
"Pour qu'un homme soit complètement seul, il faut qu'il contemple les étoiles."
"Nous élevons des monuments à nos ancêtres. Nous écrivons des biographies, des histoires, de la critique. (...) Pourquoi ne nous donnerions-nous pas la satisfaction de nous mettre en relation directe avec l'univers ?" Ce court essai vivifiant nous plonge dans les flots de la nature. Qui voit réellement le soleil, les arbres, les montagnes ? En insufflant le sentiment de la nature, le philosophe et poète américain cherche à rendre le lecteur conscient du plaisir qu'il éprouve à en percevoir la beauté et la grandeur, inspiratrices pour les sages comme pour les artistes, par le langage comme par la morale. "La nature est faite pour conspirer avec l'esprit notre émancipation". Elle nous guide, selon lui, au beau et au vrai : "tout esprit se bâtit une maison, plus qu'une maison, un monde ; plus qu'un monde, un ciel." Anne-Marie
Être un réfugié, est-ce encore être soi-même ?
" Nous avons perdu notre foyer (...). Nous avons perdu notre travail (...). Nous avons perdu notre langue (...). Nous avons abandonné nos parents (...), ce qui signifie que notre vie privée a été brisée." Réfugiée à New-York, la philosophe rédige en anglais un article sur la situation des juifs fuyant le nazisme. Quels sont les devoirs du bon immigré ? Rester optimiste, oublier son passé, ne pas faire mention des problèmes, devenir un bon patriote dans son nouveau pays, accepter le déclassement, changer d'identité, rester positif, s'adapter, s'effacer. Échappant à des lieux faits "pour crever", il faut bien faire un choix entre disparaître sous le masque de l'assimilation ou dans un suicide libérateur. Hannah Arendt rappelle que les réfugiés "ne sont que des êtres humains", liés aux autres nations, dont le principe civilisateur appelle à protéger les plus faibles d'entre eux. Anne-Marie