Delfino ou l'art du romanesque...
Jean-Paul Delfino est un conteur-né. Il choisit aujourd'hui de transporter son lecteur dans les années 1870, après la Commune, entre Paris et la Guyane. Dans un grand souffle romanesque, l'Auteur nous narre trois destinées qui étaient faites pour s'entrechoquer. La jeune Clara, cueillie comme pétroleuse, est condamnée à huit ans de bagne. Mané, esclave noir, fuit le Brésil pour la Guyane avec l'espoir de devenir un homme libre. Quant à Alphonse de Saint-Cussien, lui a brûlé la chandelle par les deux bouts. Il part à l'aventure et traverse l'Atlantique dans le but de se refaire. Ce roman fait assurément partie de ce qu'on appelle "les grands Delfino". Il nous captive par la force de ses personnages - magnifiques Clara au caractère bien trempé et Mané, idéaliste et philosophe -, par cette science du romanesque. L'écriture est toujours aussi vive et enlevée. On ressort avec des étoiles plein les yeux tant ces aventures, à la façon d'un Candide, nous ont subjugué !
Règlement de comptes à Poca City
David Baldacci est un auteur américain qui ne compte plus les best-seller à son actif. Avec "Une bonne action", il nous présente un nouveau héros, Aloysius Archer, homme plein de ressources. Dans ce polar à l'ancienne, il est question de femmes fatales et de rédemption... Il est aussi question de flics justiciers pour qui découvrir la vérité passe au-delà des simples pressions de l'institution et des faux semblants. Archer, proche des 30 ans, a fait la guerre et s'en est sorti. Rentré au pays, il a aussi fait de la prison. Alors, quand libéré sur parole, il se retrouve dans la petite ville de Poca City accusé du meurtre d'un magnat local, il doit prouver son innocence. Un héros attachant, une psychologie fine, une enquête qui fait la part belle aux personnages tout droit sortis d'un bon vieux film, voici les ingrédients de ce très bon polar...
La vie est-elle un roman ?
Gaëlle Nohant, dans ce nouveau roman, nous bouleverse. Son héroïne, Irène, française résidant en Allemagne, travaille pour le plus grand centre de documentation sur les horreurs nazies. Agée d'une quarantaine d'années, elle se voit confier la mission de restituer à leurs familles des objets ayant appartenu aux victimes des camps. Et c'est là que la magie du récit opère. Toute à sa mission, Irène va traverser les frontières, pour retrouver des descendants de l'horreur de la Shoah. Dans une construction mosaïque parfaitement maîtrisée et qui emporte le lecteur dans le passé romanesque de victimes retrouvées, Gaëlle Nohant restitue des "échappées magnifiques". Il s'agit ici d'une lecture poignante qui réussit le tour de force de toujours nous tenir en haleine. Les témoignages reconstitués, les époques recréées, tout sonne juste dans ce "Bureau d'éclaircissement des destins". Ou quand la littérature et ses héros de papier permet encore et toujours de se souvenir...
Quand Kafka revit sous nos yeux...
La plume de Laurent Seksik permet de saisir son héros, Franz Kafka, à bras le corps. Après le succès que l'on sait concernant Stefan Zweig (85 000 exemplaires vendus et une pièce de théâtre adaptée et jouée 450 fois) et Albert Einstein (70 000 exemplaires), le médecin-écrivain s'empare d'un nouveau géant de la littérature. Et réalise un tour de force, celui de faire revivre l'écrivain tchèque alors que la tuberculose le ronge. Et c'est bien toute une galerie de personnages qu'il convoque et mêle à son histoire pour faire revivre "son" Kafka. Trois ont une importance capitale : le jeune Robert Klopstock, compagnon admiratif et étudiant en médecine qui l'aide à mourir ; Dora Diamant, qu'il épousera ; enfin sa soeur chérie Ottla. On apprend dans ce récit vrai tout ce qu'était le conteur tchèque. Cet employé modèle des assurances, ce génie littéraire qui voulait brûler ses oeuvres. Heureusement, Max Brod, son éternel ami, sauva de la disparition des témoignages inestimables de son talent. Ce livre est enlevé, émouvant, et donne envie de se replonger tête la première dans cet univers... kafkaïen.
Une affaire criminelle hors norme dans l'entourage du Roi-Soleil
Il y a dans "La Chambre des diablesses" toute la verve et la science du récit qui nous avait emballés à la lecture de "L'Embaumeur" et de "La redoutable veuve Mozart". Il faut dire qu'Isabelle Duquesnoy s'empare d'une histoire incroyable, celle de l'empoisonneuse la Voisin... Condamnée en 1680 à mort par les juges du Roi-Soleil, celle-ci reconnut avoir fait tuer plus de 2500 enfants... Elle s'illustra par ses talents avérés ou feints de devineresse. Dans son antre, elle recevait le peuple, mais c'est surtout ses ramifications extraordinaires avec la Cour qui lui offrirent la fortune. Ou quand duchesses et autres marquises voulaient faire revenir un amant dans leur lit ou bien se débarrasser d'un mari un peu trop vieux ou gênant à la fois... La Montespan, longtemps maîtresse officielle de Louis XIV, fit partie de ses plus "prestigieuses" clientes. De là à vouloir empoisonner le roi... Dans ce récit parfois cru mais toujours exaltant, Isabelle Duquesnoy nous donne à lire la confession de sa fille, Marie-Marguerite, qui nous raconte ses années comme assistante. C'est passionnant, c'est vif, c'est cruel, mais c'est surtout le Grand Siècle qui renaît sous nos yeux !