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Thierry C.

http://lesangnoir.wordpress.com/

«Acheter des livres serait une bonne chose si l’on pouvait simultanément acheter le temps de les lire.» Schopenhauer
Et à quoi sert la littérature?
Peut-être à essayer de vivre selon les nuances car la littérature est «maîtresse des nuances» disait Barthes.
La littérature «s'embarrasse» de nuances. Ne se sépare de personne.
Elle s’intéresse aux différences, aux subtiles différences, aux sensibles singularités.
Elle veut comprendre. Raconter. Regarder. Éclairer l’existence.
Teinter la vie. Sucrer, saler la vie.
La littérature aide à respirer. Reprendre souffle. A souffler, un peu. Sûrement!

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10 janvier 2014

«Les océans n’ont pas de limites. Ils ne connaissent ni début ni fin. Le vent ne s’arrête jamais. Il lui arrive de disparaître, mais uniquement pour reprendre des forces ailleurs, et il revient se jeter contre l’île, comme pour signifier quelque chose…»

«Une vie entre deux océans» est le premier roman de l’australienne M.L. Stedman.
Et là, livre fini, fermé, encore tout chaud entre mes mains tremblantes d’exaltation, les bras ballants d’émotion, les yeux embués de larmes, je dis bravo et merci pour ce grand, très grand moment de lecture.
Quelle histoire ! Mais quelle histoire !
Tom Sherbourne est de retour de la guerre des tranchées. La tête encore envahie de cauchemars.
Il rentre en Australie.
Tom est gardien de phare sur l’île sauvage de Janus.
Loin de tout.
Il vit des jours paisibles, rythmés par les marées et les tempêtes, avec sa femme Isabel.
Isabel subit, coup sur coup, deux interruptions de grossesse.
Puis accouche d’un enfant mort-né.
Quand échoue sur une plage de l’île de Janus une petite barque…
A son bord un homme mort et un bébé sain et sauf.
Une petite fille.
Voilà le début de l’histoire.
De quoi imaginer le meilleur… comme le pire.
«Ici, l’existence se déroule sur une échelle de géants; les rochers, qui, de loin, ressemblent à des dés jetés contre les côtes, sont des blocs larges de plusieurs dizaines de mètres, léchés par les vagues depuis des millénaires, projetés les uns contre les autres jusqu’à s’entasser en une pile verticale.»
Frère lecteur, je ne vais pas aller plus loin.
Je vous abandonne ici. Et je vous souhaite un bon voyage en Australie.
Ce livre me rappelle le magnifique et envoûtant (et trop méconnu) «Le gardien du feu» de Anatole Le Braz.
« Lorsqu’on la contemple en toute sécurité de la chambre d’un phare ou de la maisonnette blanche d’un sémaphore, comme cela, oui, je comprends la mer. Autrement, non ! Paradis des hommes, mais enfer des femmes !….» écrivait Le Braz.
Préparez vos mouchoirs…
Un gros coup de cœur pour moi !
«Bientôt, les jours se refermeront sur leurs existences, l’herbe poussera sur leurs tombes, jusqu’à ce que leur histoire se résume à quelques mots gravés sur une stèle que l’on ne vient jamais voir.»

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15 décembre 2013

Un titre accrocheur, une image de couverture attirante, un héros nommé François Villon, une intrigue rebondissante, des escarmouches «en veux-tu en voilà», des contrées magiques à visiter, voilà de quoi alpaguer le chaland qui hante les librairies à la recherche de dépaysement.
Un livre d’aventures, c’est toujours bon à prendre !
Le poète-brigand auteur de la célèbre «Ballade des pendus», François Villon, se retrouve, en échange de sa liberté, compromis dans un obscur complot qui va nous mener jusqu’à Jérusalem.

Raphaël Jérusalmy invente un chemin romanesque là où se perdent les traces de François Villon.
«Le 5 janvier 1463, le Parlement casse le jugement et le bannit de Paris. Nul ne sait ce qu’il advint de lui par la suite.» Il a trente-deux ans.
Et nous voilà transportés dans le Paris du XVème siècle, la France de Louis XI.
C’est le temps des premières imprimeries de Mayence, de la sainte Inquisition, des premiers écrits réformistes rédigés par un obscur curé de la Forêt Noire, d’une Jérusalem mystérieuse et ténébreuse dominée par un gouverneur mamelouk.
Amoureux des livres, ce roman est fait pour vous !
Promis, vous allez palpiter au fil des pages dans le monde secret de "la Confrérie des chasseurs de livres".
Promis, juré, vous allez vibrer dans le monde tumultueux de l’histoire des idées.
Promis, juré, craché, vous alllez frémir auprès des hérétiques, des alchimistes, des savants, des imprimeurs clandestins, des Coquillards et des moines copistes.

Ce roman a un petit air de «Angélique Marquise des Anges» et de «Au nom de la Rose».
Un très bon moment de lecture, c’est déjà beaucoup, non ?

Je vous conseille de lire ce livre accompagné du superbe «Quattrocento» de Stephen Greenblatt, l’histoire de Le Pogge, un humaniste florentin qui, en 1417, découvre un manuscrit perdu qui changera le cours de l’Histoire.

«Frères humains qui après nous vivez
N’ayez les cœurs contre nous endurcis,
Car, se pitié de nous pauvres avez,
Dieu en aura plus tost de vous merciz.
Vous nous voyez cy attachez cinq, six
Quant de la chair, que trop avons nourrie,
Elle est pieça devoree et pourrie,
Et nous les os, devenons cendre et pouldre.
De nostre mal personne ne s’en rie :
Mais priez Dieu que tous nous vueille absouldre!»

La ballade des pendus de Villon

roman

La Martinière

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15 décembre 2013

"Pour Aimée, le texte qu’elle a sous les yeux n’est pas français. Ou alors, si, du français comme l’écrivent les enfants: ponctuation aléatoire, excitation improbable, enchaînement incohérent.»
1929 à Paris.
«Paris et ses monuments, l’émerveillement des grandes avenues, la majesté de la tour Eiffel, la douceur des parcs, le bruit réconfortant des bistrots.»
1929 à Clichy.
«Clichy, à cette époque, on ne sait pas trop ce que c’est. Plus vraiment la campagne, pas encore Paris. Une ville poisseuse, grise et humide. Déjà l’endroit où la capitale déverse ses déchets et ses indésirables.»

1929. La Grande Guerre se cicatrise… En attendant la prochaine…

Aimée est secrétaire au dispensaire du 10, rue Fanny, à Clichy.
Dispensaire d’hygiène sociale où l’on soigne toute la misère du monde.
Habillé de tricots mangés par les mites, pouilleux comme ses malades, un certain Louis Ferdinand Céline reçoit les tuberculeux et autres syphilitiques. Un médecin des pauvres.

Aimée, fille unique de bretons émigrés à Paris.
Aimée, on pourrait l’oublier.

Céline écrit son «Voyage au bout de la nuit.»
Céline, on ne l’oubliera pas.

L’écrivain propose à Aimée de dactylographier son premier roman.
Céline lui apporte ses brouillons dans une brouette.
Aimée sera donc la première lectrice de ce roman qui va révolutionner la littérature.
Aimée choquée, dégoûtée par ce style anarchique, ces expressions vulgaires, ces personnages lubriques.

Cette Aimée est très attachante. La troublante relation qui, petit à petit, s’installe entre Aimée et Louis est touchante à lire.

J’ai trouvé ce livre vraiment agréable. Un très bon moment de lecture.

Vincent Jolit est né en 1978 à Hyères dans le Var. Après l’obtention de son DEA de Lettres modernes consacré à l’intertextualité romanesque, il devient bibliothécaire à la médiathèque de Hyères. Il vit actuellement à Toulon.

«Clichy» est son premier roman. Et là je dis : «Bravo et merci !»

«L’originalité est très peu de chose. C’est plutôt une petite technique, nouvelle, par exemple comme le crawl à la place de la brasse…» (Céline)
Le style de Céline invente un crawl littéraire.

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15 décembre 2013

Lucrèce (entre 98/94 et 55 av JC) restera le grand nom de l’épicurisme romain.
Son long poème en vers (7 400 héxamètres non rimés), "De la nature" (De rerum natura), hommage vibrant à Epicure, hymne insolent à Vénus la déesse de l’Amour, innovante vision scientifique du monde, nous parle, encore, plus de deux mille ans plus tard, de religion, du plaisir et du sexe, de la maladie et de la mort, de la nature, de la société.
Ce texte va influencer Shakespeare, Michel Ange, Boticelli, Montaigne (qui le cite abondamment dans ses Essais), Giordano Bruno, Machiavel.

Stephen Greenblatt nous raconte (nous conte merveilleusement), avec une érudition passionnante (jamais pesante, ni prétentieuse), la redécouverte de "De la nature" par l’italien Poggio Bracciolini, dit le Pogge en 1417 dans un monastère au sud de l’Allemagne.
Comment ces moines allemands ont-ils accueillis ce brûlot ?
Pourquoi ont-ils copié et recopié cette poésie sulfureuse ?
Comment et pourquoi ont-ils sauvé cette oeuvre révolutionnaire ?
Latiniste brillant, le Pogge fut "scriptor" (clerc chargé de rédiger les documents officiels de la curie), secrétaire apostolique puis "chasseur" de manuscrits de la Rome classique et de l’Antiquité.

C’est le début de la Renaissance et de ses humanistes.
C’est l’histoire de l’écriture, des rouleaux de papyrus à la naissance de l’Imprimerie en passant par les codex.
L’histoire mouvementée du douloureux passage des religions païennes au catholicisme.
L’histoire de l’agonie de l’Empire romain d’Occident.
L’histoire, souvent scandaleuse et parfois rocambolesque de la papauté.
L’histoire du devenir des textes païens remis à jour par les humanistes de la Renaissance.

Le Pogge va redonner vie (comme une renaissance), après des siècles de silence et d’obscurantisme, au poème radical de Lucrèce.
Ce texte, obscène et malfaisant selon l’Eglise catholique officielle prétend que l’âme se dissout après la mort, "ainsi du vin quand son bouquet s’est évanoui, du parfum dont l’esprit suave s’est envolé".
Ce texte affirme que l’Univers n’a pas de créateur ni de concepteur, que la Providence est le fruit de l’imagination.
Ce texte voit la vie comme une recherche du plaisir.

Cet essai de Greenblatt est un coup de maître.
Non, non, cher lecteur, surtout ne fuyez pas, ce bel ouvrage se lit comme un roman.
Une véritable mine d’or d’histoire culturelle.
Un grand moment de lecture, les yeux écarquillés de bonheur d’apprendre.
Sincèrement recommandé.
Tiens, j’ai déjà envie de le relire…

"Les poèmes du sublime Lucrèce ne périront que le jour où le monde entier sera détruit." Ovide

Robert Laffont

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30 avril 2013

"En 1984, on pensait généralement que peu de fans des Rolling Stones aiment les livres. Je suis heureux que celui-ci ait fait exception à cette règle, puisqu'il est constamment réimprimé depuis vingt-huit ans, et toujours présent pour marquer aujourd'hui le demi-siècle d'existence des Stones."


Des biographies sur les légendaires Stones il y en a des tonnes et des tonnes...trop, trop...

Celle de François Bon, celle de Nick Kent, celle de François Jouffa, celle de François Plassat et celle de...et puis celle de...
Trop c'est trop.
Ne perdez pas votre temps allez tout droit lire celle de Philip Norman qui reste une référence avec celle de Stanley Booth.
Faites moi confiance...

Si vous avez écouté, si vous écoutez et si vous écouterez "Sympathy For The Devil" en boucle, vous voilà servis.
Ces diables de Stones on fait coulé beaucoup d'encre, de sang et de dollars...trop, trop...
De la naissance du groupe adepte du Rythm and Blues, à la noyade de Brian Jones (fondateur du groupe), du terrible et cauchemardesque concert d'Altamont aux démélés financiers autour des droits d'auteurs, des orgies alcoolisées aux matins brumeux aux goûts de LSD...vous saurez tout (ou presque) sur ces sacrés musicos que sont les Stones.

C'est aussi un voyage (psychédélique !) au pays des sixties.
"Dans cette rue grise, ils rayonnaient comme des dieux solaires. Ce n'étaient pas des humains, mais bien plutôt des créatures venues d'une autre planète..." écrit Nik Cohn en 1965 à Liverpool.

Suivez mes précieux conseils, enfilez votre casque et écoutez ces albums (Aftermath, Let It Bleed, Stikies Fingers, Exil On Main Street, pas plus...après le reste c'est comment dire, trop, trop...) en lisant "Dance With The Devil" de Stanley Booth et "Les Stones" de Philip Norman et vous m'en direz des nouvelles...
Non, ne me dites pas merci c'est vraiment parce que je vous aime bien !

"Let me please introduce myself
I'm a man of wealth and taste
And I lay traps for troubadors..."