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Hélène-Lecturissime

http://lecturissime.over-blog.com/

Littéralement passionnée par la littérature, je cherche par tous les biais à partager cette passion et à découvrir de nouveaux romans ou auteurs inoubliables...
J'ai créé récemment un blog de lecture spécialisé en littérature étrangère, ce qui me permet de faire de belles rencontres...

Anne Carrière

24 novembre 2010

Un très grand roman.

La puissance de l’écriture nous emmène allègrement sur les traces de cette famille si tourbillonnante. Le récit est passionnant, envoûtant, drôle quelquefois, tragique souvent, décalé tout le temps.

- Le narrateur entre dans le vif du sujet de façon subtile et délicate : il plante le décor, parle de lui avec sincérité, peint quelques scènes familiales pour permettre au lecteur de cerner sa famille avant de véritablement ouvrir la porte qui mène aux vérités effrayantes… Ces vérités sont alors d’autant plus puissantes qu’il ne se perd pas dans le pathos et nous livre un récit très pur de ce qu’il a vécu.


- C’est un homme qui souffre profondément et souhaite si ce n’est panser, du moins penser ses blessures pour que d’autres souffrent moins. Un grand homme…

« Ce que j’achetais ce jour-là ne changea strictement rien, et j’ai passé ma vie entière à en parcourir, des kilomètres à pied, à chercher une chose ou une autre, la chose qui ferait la différence entre ce que j’étais et ce que je voulais être. […] Quelque chose qui me dirait qu’enfin je n’étais plus sans espoir, que je n’étais ni petit, ni faible, ni laid, ni pauvre […].

Quelque chose qui viendrait apaiser la terrible beauté et l’inconsolable tristesse de la vie.

Je ne l’ai jamais trouvé. Je ne cesserai jamais de la chercher. » (p. 169)

« Je la raconte [cette histoire] parce que j’ai dans le coeur une douleur poignante en imaginant la beauté d’une vie que je n’ai pas eue, de laquelle j’ai été exclu, et cette douleur ne s’estompe pas une seconde.

[…]

Je la raconte pour tous les garçons, pour la vie qu’ils n’ont jamais eue.

Je la raconte car je tente de croire, car je crois de tout mon cœur, que toujours demeure l’écho obstiné d’une chanson. » (p. 249)


- Je dois avouer avoir quand même reçu un coup au cœur quand la « férocité » fut dévoilée. Mais une fois le temps du choc passé, je ne peux que m’incliner devant la puissance de ce texte essentiel.

- Le titre français est mal choisi. Robert Goolrick avait intitulé ce roman : La fin du monde telle que je l’ai connue : scènes d’une vie, bien loin de ce « Féroces »…

24 novembre 2010

Un roman ensorcelant. Susan Fletcher est une grande magicienne…

Le portrait de Corrag, archétype des êtres rejetés pour leur étrangeté, est subtilement peint : la jeune fille se livre à la première personne avec toute sa naïveté, sa jeunesse, et sa beauté, et parallèlement, dans les lettres qu’il écrit à sa femme Jane, la voix de Charles donne un point de vue externe sur elle, point de vue qui va évoluer au fil du récit de cet étrange personnage.

Charles est finalement admiratif et fasciné par cette femme lumineuse :

« Jamais je ne me suis tenu immobile dans un marécage, ni n’ai entendu une chouette hululer. » (p. 308) dira-t-il, soudain ébranlé dans ses certitudes. Ce qu’il croyait vrai et juste n’était que l’ombre de préjugés insufflé par d’autres.

Mais Corrag ne sera plus la même après ce récit, elle qui a pourtant appris à se méfier des hommes :

« Tellement de haine dans le monde. Tellement de tristesse.

Ma mère disait toujours il n’y a pas de diable. Rien que les coutumes diaboliques de l’homme. Et elle allait là où étaient le vent, les hauteurs et l’herbe, car ces endroits-là ne pouvaient pas lui faire du mal, pas comme les gens. » (p. 306)


Elle aura rencontré quelques hommes irradiant la même lumière qu’elle, quelques hommes qu’elle s’autorisera à aimer, malgré l’avertissement désabusé de sa mère.

« Mais il y a aussi de la lumière. Elle est partout. Elle inonde ce monde, le monde en est rempli. Un jour, assise au bord de la Coe, je regardais des rayons de lumière tomber à travers les arbres, à travers leurs feuilles, et je me suis demandé s’il y avait quelque chose de plus beau que ça, ou de plus simple. Il y a maintes beautés. Mais toutes –depuis la neige jusqu’aux cheveux d’Alasdair, roux comme les fougères, jusqu’au ciel reflété dans l’œil de ma jument quand elle humait l’air sur la lande de Rannoch -, toutes ont de la lumière en elles, et elles valent la peine. Elles valent la peine de ce qui est sombre. » (p. 385)

- Le souffle lyrique aère ces pages et leur offre une dimension supérieure. Jeune femme sauvage, Corrag vit en harmonie avec les éléments, et nous offre une vision pure de cette nature souvent ignorée au bénéfice des hommes et de leurs tourments. Nous parcourons les High lands à ses côtés, et comme pour Charles, c’est tout à coup une autre vision du monde qui s’offre à nous.

« Je pense ça, et je lève les yeux.

C’est le soir. La lune est à son premier croissant. Il y a des étoiles, et le bruit d’un ruisseau, et dans l’obscurité j’entends même des ailes d’insectes. Je me dis quels présents nous recevons. Quels présents, chaque jour.

Je m’enveloppe dans votre manteau, je respire. Je souris.

Je vais devant moi sous le ciel, à travers la lande. » (p. 388)

24 novembre 2010

Roman atypique, « Passage du désir » brille par son humour et son originalité. Et les romans policiers drôles sont assez rares pour être mentionnés...

Grand prix des lectrices de Elle 2005, catégorie policier.

Un duo d'enquêtrices de charme et de choc. Les deux enquêtrices sont attachantes, vives et drôles.

- L’atmosphère : il s'agit d'un roman policier, mais l'atmosphère du roman est au premier plan, supplantant l'intérêt de l'intrigue. Comme chez Fred Vargas, on retourne vers cet auteur, non pour le suspens lié à l'intrigue, mais plus par amour des personnages phares de la série, pour l'atmosphère, les dialogues...

- Véritable déclaration d'amour à Paris et ses quartiers, « Passage du désir » se situe dans le 10e arrondissement de Paris. On rencontre sa faune particulière et on s'attache immanquablement à ce quartier vivant.

24 novembre 2010

Les envolées lyriques de Laurent Gaudé ont trouvé dans ce sujet tournoyant une belle matière pour s'exprimer et s'exhaler...

Ce sont des personnages fêlés qui se présentent à nus en s'exprimant tour à tour au fil des pages, et la tempête va permettre de balayer les angoisses de certains, et d’apaiser les âmes des autres. Josephine est l'une des plus attachantes :


« Moi, Josephine Linc. Steelson, pauvre négresse au milieu de la tempête, je sais que la nature va parler. Je vais être minuscule, mais j’ai hâte, car il y a de la noblesse à éprouver son insignifiance, de la noblesse à savoir qu’un coup de vent peut balayer nos vies et ne rien laisser derrière nous, pas même le vague souvenir d’une petite existence. » (p. 52)


Ce que j’ai moins aimé :

- Les alligators…

- Le prêtre qui ne parvient pas à bien saisir le message que lui envoie Dieu est assez déroutant dans sa psychologie.

- Une certaine tendance à en faire trop peut néanmoins rapidement énerver le lecteur s'il ne se laisse pas emporter par la verve lyrique...

24 novembre 2010

Une déception

Le portrait de Charles Dickens sonne plutôt juste et c’est avec intérêt que l’on suit son parcours, ses relations et discussions avec Wilkie Collins, ses difficultés conjugales, ses hésitations devant les affres de la création…


- L’idée de départ était louable : montrer combien la frontière entre sauvagerie et civilisation est ténue...

MAIS :

- Le postulat de départ se perd dans des entrelacs de généralités :

« Mais la marque de la civilisation et de la sagesse, c’était de vaincre le désir, de le nier et de l’écraser. Faute de qui on ne valait pas mieux que Michel l’Iroquois ou qu’un Esquimau » (p. 65)

- Le résumé peu clair entremêlant époques et personnages est assez représentatif du roman. Le lecteur se perd facilement entre les différentes époques, avançant laborieusement dans sa lecture, qui, pourtant, semblait prometteuse…