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15 mai 2010

Crime de livre-majesté

Les reines lisent-elles ? A cette question, le petit livre d’Alan Bennett, la Reine des lectrices, répond par l’affirmative. A l’approche de son 80ème anniversaire, Elisabeth II se met à lire avec frénésie. Elle qui dispose de multiples bibliothèques dans ses palais redécouvre les livres par hasard alors que ses chiens l’amènent près d’un bibliobus londonien. Par devoir et respect, elle emprunte un livre dont chacun, à commencer par elle, pense qu’elle ne lira pas. Commence alors une profonde plongée dans le monde des lettres, de la république des lettres se plaît à écrire le britannique Alan Bennett.

« Les livres ne souciaient pas de leurs lecteurs, ni même de savoir s’ils étaient lus. Tout le monde était égal devant eux, y compris elle. La littérature est une communauté, les lettres sont une république », écrit-il. Ivre de lecture, la reine commence alors à délaisser pour partie ses engagements de reine pour s’adonner au vice des livres. L’occasion pour l’auteur du roman de passer en revue une kyrielle d’auteurs dont certains français comme Genet et Proust. « Lire c’est se retirer », critique l’un des conseillers de la reine qui l’engage à délaisser la lecture pour revenir à l’action. Dans l’impossibilité d’avoir « son cœur à la bouche », compte tenu de ses fonctions et de la distanciation qu’elles supposent à l’égard de ses sujets, la reine se cache, et planque ses livres sous ses coussins, dans sa commode et n’hésite plus alors à rabrouer voire à congédier ceux qui la défendent de continuer à lire. Mais le temps des livres est celui de la réflexion. Et c’est l’action qui intéresse la reine. Elle se met alors à écrire elle-même : « on n’écrit pas pour rapporter sa vie dans les livres, mais pour la découvrir ». A l’âge où « les évènements ne se produisent plus : ils se reproduisent », la reine se libère et veut écrire. « [Les livres] viennent plutôt confirmer une opinion ou une décision que l’on a déjà prise, parfois sans s’en rendre compte. On cherche dans un livre la confirmation de ses propres convictions. Chaque livre, à tout prendre, porte en lui un autre livre ». Ce n’est pas peu dire que le roman de Bennett change la perception que l’on peut avoir d’une reine quand on est né sous une république. Même si l’on sait l’intrigue imaginaire. Bennett permet ainsi l’invention d’une nouvelle expression, plus jolie et plus douce que celle dont elle est inspirée : être coupable de livre-majesté.

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4 mai 2010

Où on va Jean-Louis ?

C'est le plus beau livre qu'il m'ait été donné de lire en la rentrée littéraire 2008 : "Où on va papa ? "de Jean-Louis Fournier. Père de deux enfants plus un, Jean-Louis Fournier raconte sous la forme de courtes saynètes la vie de deux de ses enfants handicapés. C'est drôle comme seuls peuvent l'être ceux qui ont côtoyé le malheur pour ne faire que trois avec lui.
"Si un enfant qui naît, c'est un miracle, un enfant handicapé, c'est un miracle à l'envers". A l'enfer aussi. A Josée, la femme qui eut la charge de Thomas et Mathieu pendant quelques temps :" Pourquoi, Josée, avez-vous jeté les enfants par la fenêtre ?". Regard interloqué de la femme. "Ce n'est pas ben, Josée, ce que vous avez fait. Je sais bien qu'ils sont handicapés, ce n'est pas une raison pour les jeter". De la paille dans la tête, une ventouse par dessus, du chagrin aussi avec ces enfants pas comme les autres "comme Einstein, Mozart, Michel-Ange". Ils seraient devenus délinquants, auraient bricolé des pots d'échappement de leur scooter pour faire plus de bruit, auraient été chômeurs, auraient aimé Jean-Michel Jarre, auraient été mariés à une conne, auraient divorcé, eu des enfants handicapés. "On l'a échappé belle".