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Tinelire

J'aime les livres du plus loin que je me souvienne ....ils m'entourent , me bercent, me cajolent, me réveillent, me font réfléchir , me révoltent parfois ...ils apportent la vie à travers leurs lignes irrégulières !
Les 40 printemps ont sonné pour moi à la fin de l'année dernière ; j'essaye de goûter la vie au présent, entourée de ma famille que j'aime ,et de mes livres ..ces confidents ...

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Sabine Wespieser Éditeur

Conseillé par
27 septembre 2012

Une superbe oeuvre poétique et politique à travers la lumière d'un roman.

J'ai beaucoup aimé ce roman et c'est pourquoi j'avais et j'ai encore aujourd'hui beaucoup de difficultés à traduire par écrit cette lumière qui émane de ce livre alors que le contexte y est si noir.

En effet l'auteure a choisi de suivre le cheminement d'un combattant,un « homme de guerre » Quân, pendant la guerre du Vietnam , de sa quête personnelle mêlée à ses obligations militaires. Elle choisit à travers ses yeux et ceux de ses camarades (qui sont parfois comme lui issus du même village et amis d'enfance), d'évoquer avec une grande finesse d'écriture voire une grande douceur de l'écrit proche de la poésie parfois , ce minuscule espoir très lointain d'un meilleur avenir pour son pays.

Cette espérance largement entachée par la mise en lumière des destructions morales et matérielles de la guerre au Vietnam « un rêve paisible suivi d'un cauchemar sanglant », du cynisme des autorités «  un idéal, voilà tout simplement le pain béni qu'il faut à nos jeunes adolescents . On n'a besoin de rien d'autre pour les transformer en moines, en soldats, ou en policiers », de la vanité des uns qui envoient les autres mourir pour une patrie exsangue dans une guerre qui jamais ne cesse. « Du fond de l'ignorance, l'ambition l'emportait . Mon père voulait réserver sa place au futur banquet de la victoire »  « - Autrefois , sur dix individus, il y en avait au moins sept d'honnêtes, de civilisés. Même impliqués dans les pires manigances, on craignait la honte.Maintenant , ce sont des ignorants qui n'ont jamais appris le moindre précepte moral qui tiennent les rênes. Ils apprennent le marxisme-léninisme, pillent potagers et rizières avec la bénédiction de Marx et couchent avec les femmes des autres au nom de la lutte des classes ».

Le périple de Quân est longtemps resté dans mon esprit tant il est intéressant à découvrir pas à pas , lignes après lignes mais aussi grâce à Duong Thu Huong qui s'est si bien glissée dans sa peau à tous les stades de son évolution morale et physique , son univers,«  Dans notre vie de soldat , la soif de paix et de joie jaillissait comme les sources en montagne . Parfois elles rejoignaient une rivière, parfois elles s'asséchaient entre les roches. C'était une question de chance ou de malchance. » cette identification au personnage principal ou à son entourage est très troublante ; son expérience du front à cette époque est une force et un atout indéniable , car même si elle écrit «  Il régnait une odeur qu'aucune littérature ne saura jamais dépeindre » , on est dans le mouvement, et, le son et l'odeur sont presque là. 
Ce roman est à lire comme un roman sans nul doute mais aussi comme une œuvre poétique :«  Des langues de feu s'élançaient , mugissaient, se rétrécissaient, s'entortillaient autour du foyer. Toutes les images semblaient possibles dans cette vieille et mystérieuse lumière, celles encore floues de l’avenir et celles déjà lointaines et troubles du passé. » et politique forte : « Edifier une civilisation est chose difficile. Mais assurer une existence civilisée à un petit nombre, rien de plus aisé. Je vous l'ai déjà dit , la civilisation , c'est un chemin ardu et long, où l'on doit de surcroît partager le pouvoir. Pour un peuple aussi primaire que le nôtre , une religion adéquate pour le guider par les plus courts chemins vers la gloire, voilà qui est cent fois plus efficace que de leur instiller des notions de civilisation » (….) « Marx a été canonisé, il est devenu un symbole moral »

Ce livre est d'une grande beauté malgré son thème , j'en suis restée imprégnée très longtemps et quand j'y songe , je me transporte très vite dans chaque moment fort passés dans les pas de Quân et de ses camarades , ce qui est pour moi signe d'une grande qualité pour ce livre.
A titre personnel , je garderai de nombreuses parties de ce texte aussi bien sur ses propos politiques, sa clairvoyance , sa poésie mais aussi des pans plus philosophiques.

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